Le chat du Rabbin
Le Chat du Rabbin nous entraîne dans l’Algérie du début du XXème siècle et nous raconte les aventures du Rabbin Sfar, de son chat, de sa fille et de toute unegalerie de personnages hauts en couleur. Tout commence lorsque le chat du rabbin croque le perroquet bavard de son maître et gagne du même coup la parole. Une fois la surprise passée, le rabbin s’étonne de voir que son chat qu’il considérait jusqu’alors comme un animal aimant mais stupide, s’avère être en fait un menteur et un polémiste de premier ordre.
En partant de ce prétexte fantastique, plus proche du conte que du récit réaliste, Joann Sfar et son co-réalisateur Antoine Delesvaux construisent leur histoire par petites touches, avec beaucoup d’humour et posent quelques questions fines sur la foi et les religions. Le choix de situer l’action entre l’Algérie française et l’Afrique en pleine période coloniale leur permet aussi de mettre en scène le racisme et l’antisémitisme quotidien de l’époque. Mais plutôt que de forcer le trait, ils préfèrent y aller en douceur et ridiculiser, plus ou moins gentiment, tout les communautarismes et les fanatismes quels qu’ils soient, pour mieux prôner l’amitié entre les hommes.
Au passage, Sfar en profite pour régler son compte à l’un des plus grands noms de la bande dessinée, dans une séquence hilarante dont je vous laisse la surprise. Finalement, en servant de tribune à un chat espiègle et impertinent, ce film réussit à faire passer un vrai message d’amour et de tolérance tout en évitant d’être moraliste.
Encore une fois, Le Chat du Rabbin vient contredire ceux qui persistent à penser que l’animation ne s’adresse qu’aux enfants. Je me suis posé la question de savoir si ce film conviendrait aux plus jeunes et ma conclusion est que s’il peut sans doute séduire les collégiens, leurs petits frères et petites sœurs risquent de s’ennuyer un peu car le scénario est plutôt bavard.
Mais pour tous ceux qui ont dix ans révolus, ne ratez pas ce film. On retrouve le style graphique très particulier de Sfar dont on avait pu avoir un bref aperçu dans le générique de Gainsbourg. On est charmé par les couleurs magnifiques et l’alternance rafraichissante entre un trait parfois grossier et un soucis du détail hérité des peintres Algérois à qui Sfar dédiait d’ailleurs le premier album du Chat du Rabbin. On retrouve aussi le sens de l’absurde et l’humour caustique de la bande dessinée avec de nombreuses séquences et dialogues qui sont repris au mot près. Et on se laisse embarquer avec bonheur dans cette équipée en autochenille Citroën à la recherche d’une mythique Jérusalem africaine. Pour les fans de la BD, ne vous attendez pas non plus à une adaptation littérale des albums. Plusieurs personnages et certains développement de l’histoire originale ont disparus pour être remplacés par d’autres, format long-métrage cinéma oblige.
Le casting vocal peut déconcerter de prime abord mais au final il donne à ces personnages une identité forte qui les rend particulièrement attachants. Le ton est sobre ce qui est plutôt original vu que le cinéma d’animation a souvent tendance à jouer la carte de l’outrance. François Morel prête sa voix et ses miaulements au chat, Maurice Bénichou s’occupe de faire parler le rabbin et les deux compères sont plutôt bien entourés puisque le reste de la distribution comprend Mathieu Amalric, Hafsia Herzi, Eric Elmosnino ou encore Jean-Pierre Kalfon.
Bref un film plein de poésie et de joie, un bon petit remède à la morosité et à la bêtise, que je vous recommande chaudement.
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